Ainsi que l'écrit Christian Guéry : « la malhonnêteté, l’anormalité d’un comportement font de biens meilleurs scénarios. L’avocat banal et qui fait son travail n’intéresse pas vraiment le cinéma. L’honnêteté ne peut être exaltée, elle peut seulement être pratiquée » (Les avocats au cinéma, PUF, coll. questions judiciaires, Préf. F. Saint-Pierre, 2011, p. 213). Le film L'avocat, de Cédric Anger, confirme les propos du magistrat. Le jeune Léo, interprété par Benoît Magimel, vient de prêter serment et intègre un cabinet, à Montpellier, en tant que collaborateur. Son patron se présente comme un « technicien de la procédure » tandis qu'un autre collaborateur est un fiscaliste ne plaidant jamais. Les premiers mois sont ennuyeux pour l’avocat débutant : les clients et les affaires se succèdent, mais rien de bien passionnant. Léo est déçu par la profession qu'il a embrassée même si son épouse, enceinte, l'embrasse tendrement quand il rentre le soir à la maison, alors qu'il est déjà tard… Pourtant, cette situation d'ennui, de routine est certainement celle que rencontre la plupart des avocats, jeunes et moins jeunes. Beaucoup font avec, faute de mieux. Mais Léo ne va pas s'en contenter, tant mieux pour lui (du moins le croit-il dans un premier temps), et surtout tant mieux pour le spectateur, qui va y trouver quelque intérêt.
Un jour, Léo décroche une affaire pénale lui donnant l’occasion de soulever la nullité d’une garde à vue et d’obtenir la relaxe de son client. C'est le début de la gloire, son nom étant mentionné dans la presse locale, les clients les plus fortunés ne manqueraient pas de venir à lui sans coup férir ! Le premier (et le dernier) de ces clients à se manifester est un chef d'entreprise, Paul Vanoni (interprété par Gilbert Melki), à la tête d'une société spécialisée dans le ramassage et le traitement des déchets. Mais Vanoni a d'autres activités, hors-la-loi celles-ci, notamment la contrebande de cigarettes, pour laquelle il est poursuivi mais finalement relaxé grâce aux talents et à l'éloquence de son jeune avocat que l'on voit plaider pour l'occasion.
Vanoni, satisfait de son avocat, va lui proposer de devenir son conseil à temps plein ou presque, pour réaliser une sorte d’audit juridique et l’aider à dissimuler les activités de l’entreprise qui pourraient révéler certaines infractions (relevant de ses activités officielles et officieuses). Et c’est là que les ennuis commencent pour Léo, lequel intègre un milieu – le banditisme – qui n’est pas le sien, le chef d’entreprise et ses « associés » se révélant dangereux et prêts à tout pour écarter de leur route ceux qui auraient l’audace de leur dresser des obstacles, ou ceux qui auraient envie de les trahir. Les évènements se précipitent lorsqu’un agent des Douanes propose précisément à Léo de trahir son « employeur » en lui communiquant des informations destinées à mettre fin aux activités criminelles de ce dernier. Cruel dilemme pour l’avocat (et suspense insoutenable pour nous !). Que doit-il faire ? En fait, Léo n’a pas vraiment le choix, l’agent des Douanes ayant à sa disposition des photos compromettantes… Nous ne dirons rien de la fin du film même si chacun peut la deviner.
Que le cinéma ne nous montre pas le quotidien parfois morne des avocats est une chose, mais nulle obligation comme nombre de films (cf également Commis d’office), de mettre en scène plutôt maladroitement un avocat pris dans une situation pour le moins invraisemblable ! Les films de prétoire américains dont le héros est un avocat ne tombent pas, eux, dans ce travers des films français, lesquels ont décidément du mal à nous montrer la justice et ses acteurs de façon à la fois spectaculaire et crédible. Il y a certes The Devil’s advocate (L’associé du diable, T. Hackord, USA, 1998) qui est plus proche du cinéma fantastique que du documentaire et qui, sans être génial, est plutôt efficace et plaisant à regarder. S’agissant de l’Avocat, c’est tout à fait différent. Comme beaucoup de films français grand public, il semble souffrir d’un manque de moyens et de temps (pour l’écriture du scénario, pour le tournage…), et donc d’un manque d’ambitions véritablement cinématographiques : L’Avocat n’a rien d’original ni de marquant ; il ne fera pas date dans l’histoire du cinéma, ni parmi les films français relatifs à la justice et aux avocats. Il s’agit d’un film mineur à ranger dans la catégorie des films que l’on peut voir sans mal, et plutôt même en priorité, sur un petit écran.
Commentaires